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Au pire on pourrait faire des Assemblées générales publiques dans ces salles d’attente, pour savoir qui vient pour quoi, ensuite on nous mettrait en tas, avec un assistant social qui nous collerait ensemble, triés par types de problèmes. Ce serait plus pratique un formulaire par tas, à la Cronenberg. Un tas organique tout poisseux, dégoulinant mais énorme de ces gens qui ont tous exactement les mêmes embrouilles, tous tassés entassés dans leurs embrouilles énormes.
Ça irait encore plus vite, encore plus rapide. On habiterait les mêmes lieux, et le temps passerait. |
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Après on se connaitrait mieux et peut-être qu’on pourrait s’organiser, créer des syndicats pour défendre nos pauvres petits tas de soucis qui font chier les autres, genre le syndicat des RSA-istes, le syndicat de ceux qui savent pas écrire, l’amicale des salles d’attente, le syndicat des femmes qui remplissent des formulaires d’une main et arrachent les pages des magazines de l’autre. On n’aurait pas besoin de venir ici on pourrait faire ça partout.
Que ça dégueule partout, pas seulement dans les périphéries, ou dans les endroits merdiques. Pas juste entre nous, parce que ça sert à rien.
Et tout deviendrait rouge, bleu et jaune criard puisqu’ils l’ont décidé, et on arrêtera le temps, et plus personne n’attendra que quelque chose arrive, parce que la chose qui sera arrivée ce sera d’être là, ensemble. |
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D’un coup on se mettrait à parler toutes et tous en même temps, on gueulerait même, pour leur faire peur, ou juste pour faire du bruit, même si on n'a rien à dire, même si on n'a pas les mots dans le bon ordre, on le dirait dans toutes nos langues, sans qu’ils captent pourquoi, avec des mots clés, comme on nous a appris, en leur agitant nos RIB au visage. Ensuite, ils fermeraient les yeux et mettraient leurs mains sur leurs oreilles et ça exploserait en un million de petits morceaux de nous. Il n’y aurait plus de salles d’attente tricolores.
Extraits du texte Aux Ingrats publié chez Air de Paris, 2018 |
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